Dans la torpeur
de la palmeraie, la branche ploie sous la lumière tremblée du printemps. Les
fruits sont encore loin. L’image est floue.
Au commencement,
ce fut une histoire d’arbres. Un oranger
d’Algérie, qui était mon refuge, pendant que ma soeur, elle, prenait ses aises
sur le figuier – bien plus majestueux, entre les branches duquel une
balançoire valsait.
Et puis il y eut
le palmier – un roi planté dans une oasis du désert – El Oued peut-être?-, chez
des amis de mes parents. Lui s’appelait Abdelwahab – le nom était mystérieux et
les adultes s’amusaient à me le faire prononcer. Ce fut ma première expérience
du ‘ayn – facile, si facile pour mes cinq ans – je crois que c’est là que mon attrait pour l’arabe s'est joué– un continent sonore et verbal s’ouvrait. Tout était lumière – la cour, avec ses bâtiments
plats, les quelques palmiers, et les hommes, qui se dressaient comme des tiges.
Un photographe aurait capté avec son appareil la géométrie de l’espace, et sa variance au
gré des heures, quand les volumes enflent sous les ombres. Peut–être ai-je
ainsi vécu mon premier souvenir esthétique – ma rencontre avec ‘le beau’. Ou
bien était-ce à Ghardaïa la blanche, quand, pour mon plus grand ravissement
d’enfant, nous avions dormi, adultes et mômes, dans la même pièce, sur des
matelas si serrés qu’ils n’en formaient plus qu’un?
Tozeur est un
bruissement de vent, et balaie mes pensées comme la caresse d’une mémoire
enfouie qui soudain affleure. Entre les
vasques d’eau verte, la danse gracile des roses trémières et le balancement
mauve du jacaranda apaisent le jacassement de mon esprit troublé. Le chagrin et les douleurs s’éloignent, et
j’aimerais qu’à jamais ils me quittent, que seule la joie et la paix demeurent.
Je cherche cette fontaine d’où puiser et distribuer la douceur sans mélange,
l’ardeur sans brûlure, l’amour sans possession, la tendresse infinie des âmes
vagabondes…
Continent verbal et sonore.. Comme s'il n'y avait jamais eu d'autres mots ni de meilleurs pour décrire la beauté élémentaire où cette langue est née. Merci pour ces lignes dansantes et profondes. G.
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